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V. Deux rois pour le prix d'un

Quand il eut faim, il descendit dans la cuisine royale, se servit, comme chez lui, dans le réfrigérateur, et se composa un casse-croûte. La nuit venue, il réalisa un très vieux rêve : il dormit dans le lit de Lynda, sans Lynda, il ne faut pas exagérer non plus.

Le lendemain matin, après s’être servi un copieux petit déjeuner, il s’installa de nouveau sur le trône, avec un vieux magazine sur les genoux pour passer le temps.

Le roi s’ennuie déjà. Il aurait aimé des pages, des chambellans, des courtisans. Il imagine l’ancienne reine, soumise au pied de son trône, le suppliant de ne pas l’envoyer en exil à La Paz.

Au cœur de ce terrible silence, il lui semble entendre des pas résonner dans une salle adjacente.

« Il y a quelqu’un ? »

Pas de réponse, mais les pas continuent de retentir. À présent, le roi s’inquiète. Lynda est certainement morte, mais son fantôme pourrait bien revenir lui mettre une raclée.

Les pas s’éloignent. On n’entend plus rien. Puis la porte d’honneur s’ouvre. Alphonse apparaît.

« Miroslav de Biffenbaf, vieille crapule, que fait ton adipeux fessier sur mon trône ?

– Or ça, manant ! Qui vous a permis d’interpeller ainsi Miroslav, roi de Syldurie par la volonté de Dieu ?

– Vous vous moquez, monsieur. Je suis Alphonse, roi de Syldurie par la volonté de Nimrod.

– Cette plaisanterie ne me divertit guère. Qui êtes-vous en vérité ?

– Je vous l’ai dit, je suis Alphonse de Baffagnon, et je succède à Lynda (que Lucifer la découpe en rondelles) en tant que roi de Syldurie.

– Vous n’êtes qu’un imposteur, et si j’avais une garde, je l’appellerais pour vous faire pendre. Alphonse de Baffagnon est un vieux pépère, et vous, vous n’êtes qu’un gamin.

– Un gamin ? Sachez, monsieur, que Nimrod, dont je suis le serviteur, l’apôtre et le prophète, m’a fait don de la jeunesse éternelle et m’a proclamé roi.

– C’est ce que nous allons voir, usurpateur.

– C’est tout vu, gros patapouf ! Et tu vas me faire le plaisir d’enlever tes vieilles fesses de mon trône avant que je vienne te les botter.

– Ça, monsieur, cet affront ne sera pas impuni. J’espère que vous savez manier le fleuret.

– Vous voulez rire ! J’ai été champion de Syldurie, et je vous promets de vous chatouiller les côtelettes.

– Eh bien ! rendons-nous sans tarder dans la salle d’armes. Nous y trouverons de quoi régler nos comptes. Palsambleu, monsieur l’impertinent, sur votre gras bidon, je signerai mon nom à la pointe de l’épée d’un M qui veut dire Miroslav.

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