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IV. Ceux qui restent

Voici, parmi les personnes que nous avons rencontrées au cours de cet ouvrage, celles qui ont spontanément disparu :

Lynda, Julien, David, Léa, Éva, Mamadou et leurs enfants, Ottokar, Wladimir, Périklès, Héléna et leurs enfants, Elvire, Timothée, Mohamed, Aïcha, Fabien et Fabienne, le commissaire Mansinque, Yakouba, Moussa, Valérie, Youssouf, Kamal, Jean-Marc, Sigur et Félixérie, Zoé, Helmut, Yannick, Suzanne, Antonia, Frantsinitza.

Ceux dont les tombeaux se sont ouverts :

Le roi Waldemar et la reine Marija, Judith.

Ceux dont le tombeau s’ouvrira pour le jugement :

Sabine, alias Samatha, Horace Dewyper, O’Marmatway, Gino, Xanthia.

Ceux qui restent :

Miroslav, Alphonse, Dimitri, Stephano, Cyril, Ivanov, Borowitch, Pi Seng Li, Paul Yssouvrez, Moustapha, Samir, Mokhtar, Mac Lehu Hesbay, le général Dubrun, Huppim et Schuppim, l’émir Abdallah, l’évêque d’Arklow, Igor, Latifa la voyante, Max, Tartuffe.

La presse écrite, orale et visuelle ne tarda pas à publier des statistiques : toutes les nations de la terre ont subi d’importantes pertes humaines. Seule la Corée du Nord n’a donné aucun renseignement, mais on dit de source officieuse, la rumeur aidant, que les infâmes camps de travail dignes du IIIe Reich auraient perdu la quasi-totalité de leurs prisonniers. La plupart des pays ont perdu un, deux, trois, et même jusqu’à huit pour cent de leur population, mais la Syldurie en a perdu cinquante-six pour cent.

Dimitri vient de recevoir un message :

« Cher Maître.

Lynda et sa clique ont disparu de la circulation. Je retourne en Syldurie pour m’y faire proclamer roi.

À tout de suite.

Miroslav, marquis de Bifenbaf. »

Dimitri est bien embarrassé : il avait promis la royauté au duc de Baffagnon. Que faire ? Après tout, il a d’autres ambitions. Qu’ils se débrouillent entre eux.

Miroslav était retourné à ses plantations en Bolivie après le onze septembre syldure et s’était plus ou moins fait oublier. Ayant appris la vacance du trône de Syldurie, il prit la sage décision de s’offrir, lui aussi, des vacances dans ce beau pays et prit le premier avion pour Arklow. Il a d’ailleurs dû s’armer d’une grande patience puisque la plupart des vols avaient été annulés.

Ayant attendu près de trois heures un autobus, il se trouve enfin dans la capitale. Quelle désagréable surprise ! Comme la ville a changé ! Elle ressemble à un village du fin fond du Larzac. Où est passée l’animation des beaux jours ? Les quartiers anciens où se bousculent les touristes ? Les rues sont désertes, la plupart des boutiques ont gardé le rideau baissé.

N’ayant pas trouvé de taxi, il doit se résoudre à gagner à pied la place Royale. Aucun soldat ne monte la garde et le palais royal, lui aussi semble abandonné. Tous les volets sont clos. La porte principale est fermée, mais non verrouillée. Il entre. À mesure qu’il progresse dans la royale demeure, il ouvre quelques fenêtres pour renouveler et l’air quelques volets pour procurer un peu de lumière. Il explore la maison en maître.

« Enfin, se dit-il, voilà ce fameux salon panoramique où cette chipie m’a humilié. Quel dommage que je ne puisse pas me venger d’elle ! »

Miroslav cherche la glorieuse salle du trône. Il la trouve enfin. De part et d’autre de ce trône, la couronne et le sceptre, symboles de l’autorité royale, sont disposés avec ordre.

« Syldurie, dit-il sur un ton joyeux. Voici ton roi. »

Il assoit ses augustes fesses sur ce siège prestigieux, pose la couronne sur son chef et s’empare du sceptre. Il demeure ainsi jusqu’au soir, dans une extase indescriptible.

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